New York Express

48h dans la grosse pomme c'est peu,

mais suffisant pour se dire que c'est assez grand & fou 

pour devoir y revenir!

Un indien dans la ville

Après 5h de vol, j'ai rejoint l'hiver. Adieu Grenadines, adieu chères Caraïbes. Il fait 0°C à NYC. Il y a des tas de gens et des tas de voitures. Un vacarme dingue et un labyrinthe de sombres et vertigineuses tours de verre ont remplacé le doux clapotis de l'eau, la torpeur ensoleillée de la plage immobile, la jungle suave et feutrée. Me voici complétement perdue à la sortie du métro en plein cœur de la mégapole. J'ai l'impression que le monde est en délire, ça clignote, vrombit et presse le pas. J'ai froid. Déboussolée et fascinée, j'essaie de me repérer dans les avenues pour trouver le terminal des bus et rejoindre West New York et mon Couchsurfing. Une longue errance m'emmène finalement de l'autre côté de l'Hudson River d'où j'ai une vue incroyable sur la cité mythique dans le soleil couchant.

Hip-hop home

L'appartement d'Ozgur et ses colocs est à la fois un havre de chaleur et de paix après ma traversée du délire urbain et une belle illustration de la vie New Yorkaise. Ils sont normalement quatre dans cet appart pas très grand au final. Mais deux amis dorment déjà en plus dans le salon pour les dépanner d'un coup dur. Ca va, ça vient car personne n'a tout à fait les même horaires mais toujours sur fond de gros son rap / hip-hop, façon Pop Smoke. Milieu essentiellement masculin, chacun m'accueille de bon cœur. Ca fume et vraiment pas que du tabac, ça boit un peu et ça joue aux cartes sur la table basse en regardant des clips. C'est marrant on dirait que c'est le même jeu qu'au Cap Vert. Un genre de jeu d'annonce de plis avec invariablement atout pique, d'où le nom : Spade. 

lara in the middle of the big Apple

 West New York est une commune du New Jersey séparée de Manhattan par l'Hudson, il faut seulement 20 min de bus pour parvenir au centre de NYC, c'est donc très pratique. C'est dommage, c'est au moment du départ que j'ai finalement à peu près saisi les arrêts, le système, le terminal, le métro des points cardinaux…

Parce qu'en ce jeudi matin, je me perds mille fois : quelle station? Quel sens de circulation? Quelle sortie? Remonter ou descendre l'avenue? Evidemment mon smartphone n'est plus smart mais éteint  vu que la batterie ne supporte pas le froid, (ne supporte plus rien en réalité) et j'ai l'impression d'avaler des kilomètres de haies de gratte-ciels dans le mauvais sens. Impossible de se repérer entre la tour très haute et la tour très haute. A 1m70 du sol, elles se ressemblent toutes!

 

Enfin, j'arrive au Rockefeller Center.

 

La veille j'ai organisé un peu mes visites et réservé mes entrées au Top of the Rock et au MOMA. Le premier est ULTRA touristique et coûte bien cher pour seulement prendre un ascenseur. Mais bon, vu que je ne faisais vraiment que passer, je voulais me rendre compte de la ville. La voir, cette forêt minérale, cette île de pierre. Du coup, j'ai craqué un billet pour accéder à la terrasse panoramique située au 70ème étage du Comcast Building. Je suis heureuse d'être là, vu à 360°, l'Empire State emblématique, Central Park défraîchi en plein hiver. Jamais vu une ville pareille! Pas étonnant que chacun s'extasie de l'autre côté de l'Atlantique entre Paris et NYC! Les deux n'ont rien à voir et la différence est forcément saisissante.

Pour la française que je suis, ce qui est curieux c'est ce mélange de fascination de la découverte et l'étrange sentiment de familiarité avec cette ville, que l'on a jamais vécue mais vue des centaines de fois au cinéma, en photo, à la télé… 

Avant d'aller me balader à Central Park, j'achète gants, écharpe, bonnet et collant. Il fait décidément trop froid pour une tropicalisée comme moi depuis novembre. Le poumon vert de la ville a perdu ses feuilles et viré au gris mais tranche toujours avec le reste par l'espace qu'il donne à l'horizon lorsqu'on lève la tête. 

Me voici tiraillée entre l'envie de me poser un peu et celle de courir après NYC. Au sortir du parc, j'opte tout de même pour une longue pause au café - écrire, trier les photos, garder contact - avant de rejoindre le MOMA : Museum Of Modern Art. Un petit bijou celui-là! Magnifiques expos, magnifiques tableaux. J'aime tout et je voudrais pouvoir en profiter bien plus mais le musée ferme tôt.

Je remonte donc les rues au couchant et à la nuit jusqu'à Times Square. Tout est dingue! Les lumières, la fumée, les enseignes. Chaque pas nous plonge dans un décors de cinéma. On pourrait croiser Anne Hathaway au passage piéton, reconnaître Carry Bradshaw monter dans un taxi, apercevoir Spider-Man au dessus de nos tête ou tailler une bavette à Rachel, Chandler et Monica dans n'importe quel Central Perk alentours. C'est vraiment étonnant comme sensation.

Alors que des milliers de fenêtres s'allument comme des projecteurs sur des centaines de mètres de hauteur, le trafic et la foule se pressent sur les trottoirs. Les bouches d'aération fument, le métro gronde.

 Je m'attarde sur un numéro de rue, du hip hop. Les américains ont le sens du spectacle c'est indéniable. Puis je cherche un resto pas trop cher dans le coin… Ce n'est pas le bon endroit et je tombe dans le panneau d'un mauvais italien. Jamais mangé une calzone aussi ratée! Enfin je patiente dans un Starbucks tout à fait glauque où des sans-abris bourrés manquent de se battre et se font mettre à la porte. En réalité, j'attends Ozgur avec qui j'ai rendez-vous dans un bar. Mais ça non plus ce n'était finalement pas une riche idée car malgré l'ambiance festive, l'endroit est bondé et bruyant, ce n'est pas très agréable. On boit une bière et on rejoint vite l'appart où la soirée continue sous de meilleurs auspices avec les colocs.

De Manhattan à Brooklyn

Nous sommes vendredi. Aujourd'hui pas de réservations. Simplement une longue marche dans le sud de Manhattan. Je prends le départ dans le quartier de Lower East Side avec environ 1kg de pancakes sur l'estomac, de quoi me tenir au corps un moment.


 J'ai eu de la chance. Etant seule, j'ai pu avoir une place rapidement au Clinton St. Baking Co. & Restaurant. Un endroit visiblement réputé pour son p'tit dèj à l'américaine. Ou alors c'est juste un attrape-touriste... Who knows? Quoiqu'il en soit je veux bien être attrapée deux fois : c'était copieux et délicieux. Je traverse Little Italy et Chinatown pour me retrouver au pied du Brooklyn Bridge. Ce monumental - qu'est-ce qui ne l'est pas ici? - et fameux pont, tout en câbles, enjambe le détroit d'East River et rallie les arrondissements de Manhattan et Brooklyn.

Il fait grand soleil à nouveau. De l'autre côté, on peut admirer les éclairs irisés réfléchis par les dizaines de parois verticales qui semblent surgirent des flots comme un nouveau film de SF. Brooklyn est plus calme, moins téléportée vers les cieux. Ici fleurissent magasins artys, friperies… Je musarde et fait une halte à la Brooklyn Roasting Company installée dans des anciens entrepôts. Je bois mon parfait latte - 7 cafés en moins de 72h, c'est une véritable obsession - dans cette image d'Épinal d'une NYC neo-indus & branchouille. En poursuivant un peu l'on tombe sur des quartiers résidentiels. Alignement esthétique de briques roses, pas de porte, escaliers, entresols et soupirail. Je commence à être sur les rotules et repars en métro jusqu'à l'entrée de Soho où je reprends mon vagabondage vers le nord alors que le jour décline. De grandes artères aux grandes enseignes luxueuses, voilà Soho. C'est le crépuscule à présent et cela fait l'effet d'être piégée dans un labyrinthe de pierre aux murs de géant.

Il fait tout à fait nuit et froid lorsque j'avise un restaurant thaï dans Greenwich Village à deux pas du club de jazz que l'on ma conseillé. Faut dire qu'il y a, sans exagérer bien sûr, mille restaurants au mètre carré! C'était pas bien compliqué mais il semble que je sois bien tombée. On m'installe au bar comme il semble être de coutume ici quand on est en solo et je grille une nouvelle fois l'attente qui s'allonge rapidement au dehors. Je crois que parler de New York sans parler de bouffe c'est proprement tronqué et j'aimerais sincèrement que vous puissiez goûter avec moi cette soupe poulet-coco après avoir siroté votre Ginger Fizz au Top Thaï.

La journée se termine sur une chaude note de bleu au club de jazz éponyme. Le Blue Note Jazz Club de New York serait un lieu mythique  qui a vu défiler les plus grands ; je n'ai pas une folle culture musicale, je suis là sur recommandation. Me revoici donc au bar avec mon cocktail - décidément! - et mon cahier dans cette petite salle plongée dans le noir. L'ambiance y est intimiste, feutrée pour un concert tout doux du duo Bill Frisell (guitare) & Ambrose Akinmusire (trompette). Bien installée au chaud dans la pénombre, sur la langue l'alcool piquant et un son suave aux oreilles, je repense à cette journée solaire, cette longue et joyeuse errance urbaine. C'est un peu comme ma tortue de São Nicolau, ça rend heureux.


Bill Frisell & Ambrose Akinmusire

time to leave

Il est déjà temps pour moi de quitter la ville incroyable et d'en rejoindre une autre. Je décolle pour Mexico à 15h. Le temps de se lever, de siffler un dernier coffee à Chelsea et il me faut partir pour l'aéroport. Dernier vol avant les retrouvailles avec les parents et Mathilde, très très bientôt. Je suis profondément heureuse de les retrouver, j'ai tellement hâte que c'est un peu ma hantise de rater précisément celui-là… Il n'en est rien. J'arrive de nuit vers 19h30. J'ai peur de prendre autre chose que le taxi, je suis fatiguée, c'est pas très cher et mama m'a mis la pression à ce sujet. L'auberge est bien là, efficace, propre dortoirs assez intimistes. Je crois que je m'écroule. Je suis portée par les évènements, les destinations et ces avions qui s'enchaînent. Pas le temps de se poser, contenir tout ce que je vis, tout ce que je vois. De réaliser où je suis et me voilà déjà partie! Ma vie est un rêve à ce moment là, je souris beaucoup trop pour rien.

Les images

Celles des œuvres du MOMA sont dans une galerie propre en milieu d'article.

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